vendredi 18 mai 2018

Haute couture de Florence DELAY

Haute couture de Florence DELAY aux éditions Gallimard, 12 euros.


Voilà le livre qui fait du bien tout en restant bien sûr aux antipodes de l’appellation "Feel good book" actuelle. 

En écrivant ce livre, nul doute que Florence Delay a été portée par la grâce de son sujet autant que par sa douleur. 

Au commencement, il y eut une visite du musée de Séville. La jeune Florence, alors âgée de treize ans, est impressionnée  par « la coupe des vêtements, l’élégance des taffetas, des soies brochées d’or et d’argent, l’audacieux choc des couleurs, violet sous jaune, lilas sur vert, carmin et citron réunis, le raffinement des détails, dalmatiques brodées de fleurs, châles agrafés par un bijou sur l’épaule, collerettes plissées, manches bouillonnantes, ceintures bouffantes, rubans qui s’envolent des chevelures, galons qui courent au bas des jupes, tout concourt à l’illusion d’une présentation de haute couture au siècle d’or ».

Florence Delay n’est pas académicienne pour rien. La richesse de son vocabulaire explose dans la description des tableaux de celui qui fut, aux côtés de Velasquez, un maître du siècle d’or espagnol, Francesco de Zurbaran. 
Le peu que l’on sait de la vie de ce dernier est restitué par Florence Delay. Il a notamment peint, et de merveilleuse façon, une série de portraits de saintes. 

Connait-on d’ailleurs la vie de ces femmes d’exception qui se sacrifièrent pour l’amour du Christ ? Accompagnée de La légende dorée de Jacques de Voragine, l’auteur examine par le menu les tableaux du maître espagnol. Description des visages, des expressions, de l’attitude, des objets tenus par les saintes (qui ont bien souvent servi à les torturer) et, au centre de l’attention, les robes, les parures et les couleurs qui les habillent, propre au génie de Zurbaran.

Les vies de Casilda de Tolède, Élisabeth du Portugal, Marguerite d’Antioche, Agathe de Catane, Lucie de Syracuse et quelques autres encore sont reprises dans leur trajectoire incroyable de saintes que des hommes profondément païens mais non dénués de passion amoureuse, affrontèrent dans leur foi, quitte à leur ôter leurs yeux, leurs seins, à les passer à la roue, à les enfermer, les souiller etc. 

Florence Delay plonge au cœur des tableaux dont elle donne un formidable cours, mesuré et précis en même temps que s’ébauche la vie de Zurbaran et son apport magistral à l’histoire de la peinture. 

Il faut aller jusqu’au bout de ce court récit pour apercevoir la correspondance intime de l’auteur avec le peintre. Une figure tutélaire de la mode du XXe siècle surgit alors et crée un pont (d’or) avec le XVIIe siècle que décèle hardiment Florence Delay. 


Voilà donc les superbes raisons qui font de cette leçon de Haute couture un bien fou.

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