samedi 28 octobre 2017

Pourquoi les oiseaux meurent de Victor POUCHET

Pourquoi les oiseaux meurent de Victor POUCHET aux éditions Finitude, 16,50 euros.


Après Olivier Bourdeau l’auteur faramineux d’En atttendant Bojangles, les éditions Finitude lancent un nouvel auteur. Nous ne sommes heureusement pas dans l’univers du cinéma hollywoodien et c’est donc en toute discrétion que Victor Pouchet, normand avéré, représente en cette rentrée littéraire les désormais célèbres éditions Finitude dont la boîte aux lettres se remplit chaque jour de manuscrits prétendant succéder de la même manière à celui qui leur a apporté gloire et célébrité.

L’histoire de Victor Pouchet bénéficie d’une couverture alléchante tirée d’une planche zoologique du XIXème siècle d'Adolphe Millot, qui nous est détaillée à la fin du livre. Ces oiseaux, aussi beaux soient-ils sont, selon Victor Pouchet, menacés d’extinction. Ainsi l’auteur nous entraîne dans une fable où lui-même semble bien seul à s’émouvoir de chutes d’oiseaux récemment recensées dans les journaux. Celles-ci ne l’auraient pas autant affecté si elles ne s’étaient pas produites tout à côté du lieu de son enfance. L’adulte qu’il est devenu s’embarque alors depuis Paris à bord d’une péniche qui propose de découvrir les berges de la Seine jusqu’à son embouchure à Honfleur. C’est un moyen comme un autre d’enquêter puisqu’il se dirige effectivement vers le lieu où s’est déroulé cet étrange « suicide » de milliers d’oiseaux. 

Sur la péniche, Victor Pouchet se révèle inquiet de lui-même. Solitaire sans attache, le monde lui parait gris. Les rencontres parmi les touristes embarqués comme lui se révèlent distantes tout comme celles avec le personnel de bord  avant que ne se produise un soir la rencontre avec Cheval Blanc le pianiste et Clarisse la seconde du capitaine. 
L’écriture de Victor Pouchet emprunte à la descente du fleuve son style parfois tourbillonnant mais en gardant une allure tranquille presque paresseuse, dérivative. Il en surgit de beaux éclats, des métaphores poétiques et subtiles comme ces souvenirs de parties de scrabble avec la grand-mère du héros. Quand les lettres manquent pour offrir un joli mot et quand les points ne sont ni double ni triple et ne comptent que pour un, toute la philosophie de l’auteur semble alors s’échapper. 

Après la cathédrale de Rouen, arrive la visite du musée d’histoire naturelle. Victor Pouchet constate que son fondateur est un homonyme. Avec zèle il étudie tous les documents qui se rapportent à son histoire, notamment celle de l’échec retentissant de sa théorie de génération spontanée récusée par le jeune Louis Pasteur. Le mystère de la mort des oiseaux s’éloigne mais doit-on penser que tout peut être résolu ? Les scientifiques, les premiers, acceptent l’incompréhension qui règne sur leur recherche. Pourquoi les oiseaux meurent (en si grand nombre) s’ajoute à une liste infinie d’anomalies terriennes qu’il est impossible d’expliquer. Si Victor Pouchet n'a pas choisi de nous rassurer, il propose cependant, et avec fatalisme, de s’abandonner à l’état des choses, de lâcher prise comme on dit maintenant et d’avouer son impuissance.

Monsieur Poinsettou

Monsieur Poinsettou de Marie Tibi et Chiara Arsego, éditions De Plaines en Vallées, 13.50 euros

Ordre et rigueur, rigueur et ordre, voilà les maîtres mots de la vie de Monsieur Poinsettou.
Monsieur Poinsettou se lève toujours à la même heure, revêt toujours le même costume, coiffe toujours ses cheveux dans le même ordre, prend toujours le même chemin pour aller travailler.... jusqu'au jour où une déviation se met sur la route de Monsieur Poinsettou. Et qui dit déviation, dit plus d'ordre et plus de rigueur: voilà notre Monsieur Poinsettou qui entre dans un monde où son chapeau devient perroquet, où les policiers distribuent du pop-corn, où "un toutou à bajoues debout sur une licorne fait la course avec un échassier en tricycle". Bienvenue dans un monde où l'imaginaire est roi! Et après tout, ne serait-ce pas là le bonheur?!

Voici un album haut en couleurs qui montre aux plus jeunes le grand pouvoir de l'imagination!

Oublie mon nom de Zéro CALCARE

Oublie mon nom de Zéro CALCARE aux éditions Cambourakis, 23 euros.

A Rome on dit toujours de quel quartier on vient. Zero Calcare est de Rebbibia, soit, pour les plus avertis, de la prison (la plus grande d’Europe). Mais Zero Calcare n’est pas en prison, la prison d’ailleurs, il ne la voit plus. En revanche, il est plutôt fier d’être un romain de Rebbibia. 

Or voici qu’un événement tragique vient de surgir dans la vie de Zero. Sa grand-mère, très âgée, sans âge même, dessinée comme un petit Calimero au féminin, s’est éteinte. Zero Calcare est très atteint par cette disparition. Pourtant, en faisant le point avec Secco, son meilleur ami, il constate à quel point il ne sait pratiquement rien de sa vie. Elle fut, très jeune, au début du vingtième siècle, recueillie par des émigrés russes, des aristocrates déchus venus se réfugier à Nice. Oui, Huguette - elle s’appelait Huguette - est française, provençale et orpheline. 

Les choses périclitent un peu plus lorsque Zero comprend que sa mère est, elle aussi, ébranlée par la mort de sa propre mère. Comment une femme aussi forte, à tous les sens du terme, peut-elle ainsi défaillir ? Qui plus est devant son fils ? Car Zero, lui, aussi rebelle soit-il, en apparence, est un angoissé de première qui continue de s’entretenir avec une peluche protectrice et son tatou… 

L’histoire de sa grand-mère, telle qu’il la résume à Secco, est édifiante, troublante. Quel genre de type Huguette a-t-elle épousé ? Un escroc ? Zero, remontant le fil de la vie de sa grand-mère remonte aussi la sienne, celle d’un ado qui a grandi dans les années 90. Un drôle de garçon représentant une génération de gamins qui, la trentaine venue, ont besoin de faire le point. 
L’identité du jeune homme, les origines de sa famille sont un imbroglio colossal et superbement excitant. Le grand énervé que l’on soupçonnait au début a, au final, une éthique exemplaire et la complexité rugueuse de son parcours est tout à fait respectable. 

Zero Calcare s’est sans doute sauvé de son tempérament dépressif par le dessin, son graphisme hyper urbain atteint par endroit une virtuosité expressionniste impressionnante. Oublie mon nom regorge de symboles, c’est une sorte de psychanalyse à ciel ouvert qui ne se referme jamais sur elle-même.

La dimension fantastique qui prend le dessus à la fin de l’histoire est une expérience superbe du champ symbolique de la représentation. L’oeuvre de Zero Calcare, pour conclure, originale et attachante, nous fait part des peurs les plus intimes de l’auteur tout en nous renvoyant à un humour de cour d’école salvateur et réjouissant.


Rencontre sur Cocteau-Radiguet

"Pendant les étés 1920, 1921 et 1923, Jean Cocteau et le jeune poète Raymond Radiguet s’installent sur la côte sauvage du bassin d’Arcachon, la côte noroît, à Piquey, petite village de pêcheurs, un paradis dont le havre s’appelle Chantecler. Ouvrant grand ses yeux qu’il a myopes, Radiguet ne se lasse pas de contempler le décor inouï d’une terre inconnue à quelques heures de Paris.
Jean Cocteau assurait que « l’hôtel de planches » de Piquey était une sorte de théâtre. Nommé Chantecler en l’honneur de son illustre ami Edmond Rostand, l’hôtel était tel « un microphone où chaque son porte ». Quant à son « cher balcon » avec vue plongeante sur les eaux vives du bassin d’Arcachon, « c’est une avant-scène de spectacle ».
Si spectacle il y a, joué au huis clos de l’hôtel Chantecler, pourquoi ne pas relever les caractéristiques d’une authentique tragédie respectant la règle des trois unités du théâtre classique : unité de lieu (le bassin d’Arcachon), unité de temps (l’été), unité d’action (vacances studieuses), avec, pour résultat un événement culturel majeur : la rénovation de l’art d’écrire un roman.
Au final, il y a  la mort à vingt ans du héros, le jeune Raymond Radiguet, entre un best seller déjà publié Le diable au corps et un roman posthume Le bal du comte d’Orgel. C’est à Piquey qu’il finit par user ses forces à combattre la maladie qui allait l’emporter avant la fin de l’année 1923."

samedi 21 octobre 2017

Chantal THOMAS à La Librairie Générale

Souvenez-vous ! Nous avions choisi Souvenirs de la marée basse au mois d'août pour lancer la rentrée littéraire. Nous pensions aussi que l'auteur ne serait pas indifférente à une invitation provenant d'Arcachon. Le résultat est là, Chantal THOMAS sera à La Librairie Générale vendredi prochain et sa venue à toutes les chances d'être mémorable.
Pour ceux qui n'avait pas lu le blog au mois d'août, nous retranscrivons ce que nous en avions pensé à ce moment-là. En relisant le livre, d'autres pensées nous sont venues, vous pourrez venir les échanger avec nous lors de la rencontre organisée à l'Hôtel Ville d'Hiver (toutes les précisions sont sur l'affiche).
          
Souvenirs de la marée basse de Chantal THOMAS aux éditions du Seuil

Si Chantal Thomas n’est pas véritablement née à  Arcachon, les années cruciales de son enfance s’y sont déroulées quelque part entre la jetée d’Eyrac et la la pointe de l’Aiguillon. 

Arcachon fut pour elle et pour sa mère l’endroit où l’on pouvait nager disons, d’avril à octobre. Si cette dernière, depuis son enfance, se devait de faire ses longueurs sans quoi une journée n’était pas réussie, Chantal, elle, affronta depuis le rivage la puissance maritime. 
Moultes révélations se sont produites dans cet espace nommé plage où les rencontres apparaissent et disparaissent dans un va-et-vient propre aux stations balnéaires et dont le jeune âge s'accommode puisque les vacances, elles, demeurent. 

La famille Thomas s’installa donc dans cette ville idéale pour une mère adepte du crawl. Son mari, un lyonnais taciturne qui ne brigua aucune distinction après ses exploits dans la résistance vécut avec flegme ces années arcachonnaises avant qu'il ne meure soudainement. Sa veuve aussitôt déclara  qu’il lui fallait vivre ailleurs, sur d’autres rivages, en Méditerranée. 

Cependant Arcachon, dans la mémoire de Chantal Thomas est la ville de la plage, du mouvement de la mer qui d’un jour sur l’autre, pour qui sait l’observer, chaque jour se renouvelle. 

Ce profond travail effectué par cet écrivain si attentive au XVIIIe siècle qu’elle a considérablement étudié, ravive des souvenirs intacts qui vont de la mère à la mer, d’une aptitude à mesurer le temps et à le différencier du passé. Joueuse et vagabonde Chantal Thomas retrouve son enfance de liberté sur le sable. 

La chambre des époux d'Eric Reinhardt

La chambre des époux d’Eric REINHARDT aux éditions Gallimard, 16,50 euros.

Que penser en refermant La chambre des époux ? L’auteur pleinement présent dans ce livre signe ici l’un des derniers soubresauts de l’auto-fiction. Ce genre littéraire développé en ce début de siècle avec excès est peu à peu remplacé par des livres qui « réparent » , des « feel good book » lorsque l’on veut angliciser et, au passage, dénigrer une littérature qui se vend. 

L’uchronie et l’"exofiction" sont désormais à la mode. Les prix littéraires de novembre se chargeront de nous le rappeler. Eric Reinhardt ne sera pas de la fête. Son histoire, en partie vrai, en partie inventée, est une histoire d’amour dont l’auteur expose des extrémités difficiles à tenir qu’hélas notre époque impose. 


Après L’amour dans les forêts qui s’enfonçait dans la violence conjugale, La chambre des époux affronte la maladie. Eric Reinhardt ne joue pas à se faire peur, sa femme a réellement été atteinte d’un cancer qu’elle a vaincu. Eric Reinhardt écrivit, durant les mois où sa femme Margot combattait son mal, le roman Cendrillon qui lui valut reconnaissance et célébrité. Cependant, cette expérience traumatisante mais aussi synonyme de réussite est exploitée, à la moitié du livre, d’une manière symbolique dans un roman nommé Une seule fleur qu’Eric Reinhardt aurait, un temps, voulu  écrire.

Cette transposition certes risquée que nous lisons au cœur de La chambre des époux est un mélo où l’amour se tient en équilibre au-dessus du gouffre du ridicule et de l’obscène. Heureusement, la prose d’Eric Reinhardt parvient à maintenir une distance stylistique salvatrice qui n’épargne pas toutefois quelques longueurs. Le jeu de tiroirs s’ouvre et se ferme et le roman inséré, Une seule fleur, finit par détrôner le propos initial de La chambre des époux. Le risque était grand. Vraisemblablement conscient de cet écueil, Eric Reinhardt n’a pas voulu  réintroduire, sinon part des intermittences bien brèves, la part auto-fictive de son livre. Une part que l’on se prend à regretter tant les passages où l’auteur déchiffre sa vie de romancier sonnent extrêmement justes. L’histoire d’Une seule fleur qui n’est pas complètement ratée, n’est  pas non plus la symphonie annoncée.

Dessine-moi un Dieu

Dessine-moi un Dieu de Atiq Rahimi et Bruno Salamone, éditions Actes Sud Junior, 15.90 euros

Voici un album qui fait partie de ceux qui amènent à réfléchir.

Atiq Rahimi, réalisateur qui se tourna vers la littérature et fut auréolé du Prix Goncourt en 2008, rappelons-le, définit sa croyance religieuse ainsi: « Je suis bouddhiste parce que j'ai conscience de ma faiblesse, je suis chrétien parce que j'avoue ma faiblesse, je suis juif parce que je me moque de ma faiblesse, je suis musulman parce que je condamne ma faiblesse, je suis athée si Dieu est tout puissant. »

Et c'est bien cet esprit d'ouverture que nous retrouvons dans l'histoire qu'il raconte ici pour les plus jeunes. Aucune religion n'est évoquée, seule la réflexion sur ce que peut être Dieu est abordée avec finesse. Comment est-il? Où est-il? A chacun de le déterminer. Eva, notre jeune héroïne, après plusieurs tentatives pour le dessiner sur sa feuille blanche, a fini par trouver la représentation qui la touchait le plus. Et c'est certainement bien là le plus important.

Astérix et la Transitalique

Astérix et la Transitalique de René. GOSCINNY et Albert.UDERZO, textes de Jean-Yves FERRI, dessin de Didier CONRAD aux éditions Albert René, 9,95 euros.

Gare ! Patrimoine national ! Chaque nouvelle parution du gaulois Astérix (et de son ami Obélix) affole le monde de l’édition. Tirage de 5 millions d’exemplaires nous dit-on. Enjeu colossal donc censé  trouver sa place dans (à peu près) tous les foyers de France.
La Transitalique est une invention formidable sortie de la bouche ensommeillée du sénateur Lactus Bifibus accusé de détourner l’argent destiné à l’entretien des voies romaines. On détectera par ailleurs de succulentes répliques de l’épouse de Lactus à propos de l’utilisation de ses fonds publics. Cependant, stupéfait d’avoir pu émettre une aussi géniale idée, l’assemblée puis César en personne le charge de l’organisation de la course de chars qui révèlera une fois encore la puissance et la supériorité des romains sur l’ensemble du monde connu. 
Les barbares pourront-ils en être ? Affirmatif. Astérix et Obélix ont vite fait d’avoir écho de ladite compétition et vont s’engager dans la course en tant que représentant de la Gaule.  

Saurez-vous reconnaître les personnalités cachées dans l’album ? Jouirez-vous de tous les bons mots parsemés tout au long de l’itinéraire emprunté par les chars ? De Modène à Naples, c’est une autre compétition qui démarre, celle de la langue française et des noms acrobatiques portés par cette internationale du sport. Celle aussi d’une histoire et d’une géographie colportée à la hussarde, celle enfin qui nous raccorde au présent, l’histoire se jouant de nos soucis quotidiens. Bref, tout ce qui faisait déjà le régal des Astérix de l’ère Goscinny/Uderzo. Faut-il néanmoins apposer un verdict à cet énergique volonté de garder vivant un héraut national ? Cela parait vain, mieux vaut se laisser porter par cet univers enchanté où la distribution de baffes fait loi.

samedi 14 octobre 2017

Les huit montagnes de Paolo Cognetti

Les huit montagnes de Paolo COGNETTI aux éditions Stock, 21,50 euros.

 On peut ne pas aimer la montagne. La pratique du ski peut tout de même ravir ceux que l’on retrouvera quelques mois plus tard se baignant au bord de la mer. Puis il y a ceux qui fuient les remontées mécaniques, qui attendent la fonte des neiges pour s’en aller sur les hauteurs, « à l’ancienne », en marchant des heures et trouver, comme le père du narrateur, l’altitude où ils se sentent enfin eux-même.

Les huit montagnes nous proposent de parcourir avec Pietro et son père une partie des Alpes italiennes à une centaine de kilomètres de Milan dans une région nommée le Grenon. Pietro n’est pas un inconditionnel comme peut l’être son père. Du haut de sa petite dizaine d’années, il galope néanmoins assez bien et tient la cadence jusqu’à parfois monter au-delà de deux mille mètres, là où justement son père trouve son altitude et le paysage qui lui convient : De la caillasse débarrassée d’arbres, une hauteur où l’air est plus pur que dans les vallées et un silence que perturbe à peine les éboulis provoqués par des chamois surpris de rencontrer des humains.

Le père de Pietro occupe durant de nombreuses pages le devant de la scène, Pietro se contentant de suivre ce père randonneur toujours d’attaque, alors que sa mère attend leur retour au village mais noue également des relations avec les villageois, et notamment avec la mère du jeune Bruno avec qui Pietro entame une amitié qui peu à peu donne une orientation nouvelle au livre. Leurs escapades estivales déterminent un lien qui forcira dans le futur. Pietro grandit, s'éloigne de ses parents et commence une carrière de documentariste. Il voyage au Népal et apprend un jour, là-bas, la disparition de son père ainsi que l’héritage que celui-ci lui a fait. Bruno resurgit alors dans sa vie et le titre du livre prend alors tout son sens.

A l’évidence Paolo Cognetti nous raconte une histoire autobiographique qu’il a transformé en conte philosophique. Son livre est profond, empathique, il communique des sentiments universels depuis une contrée isolée que l’on a tôt fait d’adopter. Toute la force de ce livre semble venir de ce Grenon, tel qu’il nous est décrit, des saisons qui le gouvernent et de l’attraction de ce lieu pour Pietro où qu’il se trouve.  

On peut ne pas aimer la montagne mais il est impossible de ne pas aimer ce livre. 

Un baobab pour Lady Lily

Un baobab pour Lady Lily de Caroline Hurtut et Amandine Dugon, Rêves bleus Editions d'Orbestier, 15 euros:

Lady Lily, dame d'un âge respectable, cultive avec passion son très beau jardin anglais dont l'élégance et le raffinement illuminent le quartier. Heureuse et fière d'un tel résultat, elle regarde chaque jour avec curiosité et émerveillement ses fleurs s'épanouir et s'amuse à en planter de nouvelles. Mais quel ne fut pas son étonnement de découvrir un matin un petit bananier se développer à l'endroit exact où elle avait planté la veille un pied de glycine! Et que dire quand les jours suivants le phénomène se reproduisit au point que son beau jardin anglais se transformait peu à peu en un jardin de plantes exotiques des plus luxuriants...
Une lettre trouvée au milieu de ses fleurs lui permettra de lever en partie le voile sur l'origine de ce mystère mais elle lui permettra d'ouvrir son cœur à la plus belle des magies.

Une histoire tendre empreinte de poésie et de finesse 
que l'illustration rend à merveille par ses couleurs et son style!

Corto Maltese Equatoria de Juan DIAZ CAZALES et Ruben PELLEJERO

Corto Maltese Equatoria de Juan DIAZ CAZALES et Ruben PELLEJERO aux éditions Dargaud, 16 euros.

Les aventures de Corto Maltese ont repris. Cette deuxième tentative de ressusciter le génie d’Hugo Pratt ne plaira évidemment pas à tout le monde. Pourtant un certain esprit règne sur Equatoria qui n’atteint certes pas la magie narrative qui porta si haut Corto Maltese, Hugo Pratt étant parvenu à extraire son personnage de l’espace alors confiné de la bande dessinée considérée comme un genre mineur destiné à la jeunesse. 

L’invention de Corto Maltese avait déjoué toutes les critiques et c’est en relisant les premiers Corto que l’on voit à quel point l’expérience aussi bien textuelle que graphique demeure aujourd’hui encore très intense. Il n’empêche que nos deux auteurs « repreneurs » du mythe parviennent à broder hardiment leur histoire autour d’un Corto Maltese  qui ne joue sans doute pas dans la même catégorie que son prédécesseur mais dont quelque chose indubitablement subsiste.  Equatoria débute à Venise où Corto embarque en galante compagnie mais délesté de son vague à l’âme. Au lecteur de tenir bon et de ne pas hériter à son tour de la mélancolie si particulière de son héros. 

A l’approche de Malte où l’on ne peut accoster en raison du choléra qui y sévit, une belle idée des auteurs transforme la côte lointaine de l’île en une silhouette féminine couchée sur la mer. Elle dialogue avec Corto : « Quand nous reverrons-nous ? » lui demande t-elle. 
Ce message languissant peut-être perçu comme une plus ou moins consciente requête d’Hugo Pratt lui-même regardant passer sa créature, impuissant à la faire venir à lui. L’allégorie est belle et donne une profonde inspiration à l’histoire.

Beaucoup de femmes entourent aussi Corto Maltese dont la présence semble suffire pour conjurer les dangers que ces dames encourent. A Alexandrie, première étape du voyage, Constantin Cavafis le poète et Winston Churchill en jeune diplomate imbu de ses bons mots font office de guest-star puis Henry de Monfreid apparait sur son bateau de marchand d’armes de la mer rouge.  Le suspense n’est, à vrai dire, pas vraiment la force d’Equatoria mais sa traversée de l’Afrique est, en revanche, convaincante.

Il faudra certainement encore quelques albums pour que les auteurs obtiennent tout le crédit des inconditionnels d’Hugo Pratt. Pour les autres, amateurs bienveillants d’aventures exotiques, Equatoria est tout à fait recommandable.