samedi 18 avril 2015

LoveStar d'Andri Snaer MAGNASON

LoveStar d'Andri Snaer MAGNASON aux éditions Zulma, 21,50 euros.


Il y a eu Le meilleur des mondes d'Aldous Huxley, il y a eu 1984 de George Orwell, les précurseurs, et, aujourd'hui, à la suite de quelques autres et avant d'autres qui viendront, nous arrive LoveStar, un titre très séduisant écrit par un islandais dont l'humour cousine avec celui d'Arto Paasilina, un finlandais, lui, mais nous savons que les nordiques, dans l'ensemble, sont souvent irrésistibles.



LoveStar, comme ses glorieux prédécesseurs, annonce un monde à venir, à la finalité d'abord commerciale, calculé grâce à une connexion permanente par des ordinateurs capables,  à votre demande, de vous donner un aperçu des décisions que vous n'avez pas prises, des choix que vous n'avez pas fait qu'ils vous vendent sous la forme d'une application nommée Regret. Ainsi vous apprenez quelles conséquences se seraient produites si vous aviez opté pour ces décisions qui se seraient avérées, à tout coup, vous l'apprenez hélas, désastreuses. 



LoveStar, derrière qui se cache un homme qualifié par tous comme un génie - outre ses fins capitalistes où le profit est roi - engendre pour les masses un bonheur automatique qui, par ailleurs, ne tardera pas à surpasser les attentes de son génial concepteur. LoveStar se veut comme une révolution esthétique composée de trois concepts majeurs : LoveMort, InLove et pour bien finir les choses, LoveDieu.



Ces idées - centrées sur : comment quitter le monde, comment connaître l'amour et comment rencontrer Dieu- ont permi à LoveStar d'atteindre une fortune colossale et d'être considéré, dans le même temps, comme un gourou ultime qui a le pouvoir de disposer du monde. Tout irait merveilleusement bien si LoveStar n'avait été soudainement  soumis à une prise de conscience qui l'a détourné de sa destinée funestement mercantile. 



Mais LoveStar est entouré de collaborateurs qui croient dur comme fer en lui et veillent à ce que chacune de ses idées soit exécutée au plus près de leur délire. Ainsi l'idée de LoveMort pose les bases d'une célébration funéraire hors du commun. InLove, quant à elle, assure l'amour parfait et définitif.  Enfin, LoveDieu doit donner accès directement à Dieu (quel qu’il soit) et réaliser toutes les prières.



Ces idées, farfelues et terrifiantes à la fois, tendent vers un discours qui ressemble beaucoup à celui de notre société. Oui, le désir de perfection est une quête effrénée accompagnée par des  messages publicitaires incessants et nous succombons sans cesse à des slogans inventés pour notre bonheur. 

L'islandais Magnason, dans son livre, se contente de les pousser à bout. Il nous présente le résultat probable de nos désirs et en révèle la manipulation qui  s'ensuivra lorsque nous aurons dominé nos passions et assouvi nos obsessions. 


La critique sociale est rude mais heureusement le roman déraille. Une erreur de calcul remet en selle les Roméo et Juliette du futur que nous désespérions voir se quitter alors qu'ils vivaient un bonheur suprême soudainement contrarié par les calculs d'InLove. L' histoire, certes, est un peu loufoque mais elle brille par son intelligence résumée par cette phrase rencontrée à la fin du livre qui met à mal l'idée du conte de fée :



"Ils s'étreignirent comme si c'était la première fois qu'ils s'étreignaient, puis s'étreignirent comme si c'était la dernière fois, puis s'étreignirent de l'étreinte de ceux qui veulent s'étreindre pour l'éternité jusqu'à ce que la mort les sépare."


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